2015 : le combat pour les libertés est plus que jamais notre mission !

Il y a maintenant un an, le 28 janvier 2014, était créé l’observatoire des libertés et du numérique (OLN), à l’initiative d’associations et de syndicats soucieux de remettre au coeur du débat politique la protection des libertés face aux assauts combinés d’une surveillance étatique et d’un fichage privé, présentés comme inéluctables et ainsi normalisés pour de nombreux citoyens.
L’année 2014 n’a pas dérogé à cette dérive, tant elle a été placée dès l’aube – avec le vote de la loi de programmation militaire – sous le signe de la surveillance et de l’érosion des libertés, tout particulièrement sur internet, désigné comme un fauteur de trouble, presque complice des pires atrocités. La mise au pilori de cette espace collectif de débat s’est d’ailleurs poursuivie lorsque la représentation nationale a été saisie, dans l’urgence, d’une énième loi antiterroriste. Dans un débat confisqué par la peur, où la réflexion critique a cédé face à un unanimisme répressif, l’arsenal pénal a été encore alourdi et dévoyé au service de la neutralisation préventive tandis que l’administration voyait ses pouvoirs décuplés sur le net comme à l’égard des citoyens, dans un élan de suspicion généralisée.
Les interventions des organisations de défense des libertés et de l’OLN ont pu faire la lumière sur les renoncements au parti des libertés. Dénoncer, encore et toujours, l’absence de saisine du Conseil constitutionnel sur la loi du 13 novembre 2014, l’inertie d’un gouvernement pourtant condamné par la CEDH à deux reprises pour ses fichiers de police (FAED et STIC), la passivité face aux révélations d’Edward Snowden sur le développement progressif d’une surveillance généralisée internationale et l’absence d’une action résolue pour la protection des lanceurs d’alerte.
Les évènements dramatiques du début de l’année 2015 n’entament pas la détermination de l’OLN : ils invalident assurément le dogme sécuritaire qui façonne depuis plus de 20 ans notre monde. Les hommes et les femmes mobilisés dès le soir de l’attaque contre Charlie Hebdo ne s’y sont pas trompés, criant leur refus d’un « Patriot act » en France, demandant plus de démocratie face à la terreur.
En cette journée de la protection des données personnelles, l’OLN veut encore croire qu’il est possible de faire un pas de côté dans un débat public de nouveau suspendu par l’effroi, où se multiplient les appels à plus de surveillance, cette fois-ci en renforçant les moyens juridiques des services de renseignement.
L’OLN conteste cette vision indéfiniment extensible du filet de la surveillance, qui a présidé à l’entrée en vigueur du blocage administratif des sites, inefficace contre ceux qui sont visés, qui le contourneront facilement, attentatoire aux libertés de tous. Mais aussi l’entrée en vigueur d’un fichier API-PNR de contrôle des déplacements aériens de tous les citoyens dont les garanties sont très faibles. Les annonces n’ont pas tardé, pour étendre ce fichier à l’Europe (qui le refusait en 2011 au nom des libertés civiles), et surtout, pour donner aux services de l’ombre plus de possibilités d’écoutes administratives et des pouvoirs policiers dérogatoires. Autant de mesures qui contribueront à retarder encore la judiciarisation des affaires de terrorismes, et les garanties procédurales qui vont avec.
L’OLN poursuivra donc son combat pour que la terreur ne fasse pas muter la démocratie, pour redire aux citoyens et aux décideurs que la surveillance est l’affaire de tous, et pas uniquement de ceux qui auraient « quelque chose à cacher », que l’internet est, et doit rester le lieu du libre débat que seule une procédure équitable peut limiter. Et que la protection des libertés ne s’arrête pas au premier cri pour la liberté d’expression : c’est bien contre le rétrécissement continu des droits et libertés qu’il faut militer, aujourd’hui plus encore qu’hier, afin que la lutte contre le terrorisme ne sape pas les fondements de la démocratie au motif de la défendre !

Organisations membres de l’OLN : Cecil, Creis-Terminal, LDH, Quadrature du Net, Saf, SM.

 

REFORMER LES FICHIERS DE POLICE : Stic et nunc ! Combien faudra-t-il de condamnations de la CEDH pour que la France réforme les fichiers de police ?

Communiqué de l’Observatoire des libertés et du numérique (OLN)
Paris,  le 6 octobre 2014

Rien n’ébranlera donc les tenants du fichage policier ! Ni les multiples critiques émises par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) à l’encontre de fichiers pour beaucoup constitués en dehors de tout cadre légal par l’administration, avant d’être « régularisés » au cas par cas, devenus tentaculaires avec le temps et pourtant si peu fiables, à l’image d’un Système de traitement des infractions constatées (Stic) rempli de données erronées dans 80 % des fiches ; ni les condamnations de la France par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), le 18 juillet 2013, pour le Fichier automatisé des empreintes digitales (Faed), le 18 septembre 2014, pour le Stic ; ni les condamnations qui ne manqueront pas d’intervenir sur les mêmes motifs pour le Fichier national automatisé des empreintes génétiques (Fnaeg).

Aveuglé par la prétendue efficacité policière de ces fichiers de population, ce gouvernement – comme ses prédécesseurs – fait la sourde oreille : il ne voit que la « finalité » des fichiers, qui légitime leur abreuvement continu, sans se soucier de leur champ, de l’exactitude des données qu’ils contiennent et du contrôle et suivi des accès. C’est pourtant bien ce à quoi la CEDH invite l’Etat français : repenser les données introduites dans les fichiers au regard des principes de proportionnalité, de pertinence, de non-excessivité et de non-stigmatisation, mais aussi ouvrir un véritable recours pour obtenir un effacement de ces données.

L’urgence est bien là : réformer un fichier Stic (devenu Taj), constitué de plus de six millions de fiches, voué à conserver pendant vingt ans les données relatives à des mises en cause, quelle que soit la gravité des faits, sans perspective d’effacement pour ceux qui n’auraient pas bénéficié d’une relaxe ou d’un classement sans suite pour infraction insuffisamment caractérisée (et même pour ceux-là, l’effacement n’est pas garanti). Atteinte disproportionnée au respect de la vie privée, nous martèle la CEDH, car le recours au procureur de la République pour l’effacement du fichier n’est pas effectif. Celui qui devrait se faire juge de la pertinence du maintien d’informations dans le fichier est, en l’état du droit, privé de tout pouvoir d’appréciation, et le citoyen est bien seul face au fichage.

L’urgence est aussi ailleurs, dans les fichiers qui contiennent et conservent pour de longues années (jusqu’à quarante ans, assimilables à une conservation quasi infinie) les données identifiantes de plus de quatre millions d’empreintes digitales au Faed, plus de deux millions d’empreintes génétiques au Fnaeg. Loin de ne recueillir que les empreintes des personnes définitivement condamnées pour des crimes, ces fichiers accumulent les empreintes de personnes mises en cause encore présumées innocentes – 80 % des personnes inscrites au Fnaeg – mais aussi de condamnés dans des affaires mineures, tant la liste des infractions concernées par les prélèvements, d’abord limitée aux crimes les plus graves, s’est étendue au mépris des principes de nécessité et de proportionnalité.

L’Observatoire des libertés et du numérique (OLN) ne se satisfait pas des réponses convenues faites à sa précédente interpellation de la garde des Sceaux. Il appelle à une réforme urgente et en profondeur de l’ensemble des fichiers de police, qui en réduise drastiquement le champ et les durées de conservation, en exclue les personnes non encore condamnées et en permette véritablement l’effacement pour des motifs légitimes. Ce n’est qu’à ces conditions que sera mis fin à ce fichage policier de masse, qui, selon les termes de la CEDH, « ne peut passer pour nécessaire dans une société démocratique ».

Organisations membres de l’OLN : Cecil, Creis-Terminal, LDH, Quadrature du Net, Saf, SM.

 

Appel à communication : « Les données environnementales massives »

Pour le prochain numéro de notre revue Terminal, lire l’appel

Date limite d’envoi des résumés (500 mots) : 15 novembre 2014.

À compter du numéro 116 (sortie prévue pour l’automne 2014), la revue Terminal sera diffusée par voie électronique sur le portail Revues.org

Rapport d’activités 2012-2013

RA_CREIS-T 2012_2013 VF